Côme SALVAIRE rejoint LAM dès la rentrée 2022

Côme SALVAIRE rejoint LAM dès la rentrée 2022

ATER (Attaché temporaire d’enseignement et de recherche), section CNU 04 « Science politique », Côme Salvaire donne des cours aux élèves de Sciences Po Bordeaux durant l’année académique.

Quel est votre parcours ?

J’ai réalisé ma thèse au Centre de recherches internationales (CERI), à Sciences Po Paris, sous la direction de Laurent Fourchard et Patrick Le Galès.

Après ma soutenance, j’ai réalisé un postdoc au Centre d’Études Européennes et de Politique Comparée (CEE, toujours à Sciences Po Paris), dans le cadre d’une ANR (Agence nationale de la recherche) portant sur les transformations du marché du logement à Londres, Amsterdam, et Paris.

Titre de la thèse: The Plebeian Metropolis. A Residual Sociology of Popular Autonomies in Lagos and Mexico City. [La métropole plébéienne : sociologie résiduelle des autonomies populaires à Lagos et Mexico]

Sur quelles thématiques portent généralement vos recherches?

Mes travaux de thèse portent sur les transformations des relations villes-États au Mexique et au Nigéria depuis les années 1980 et sur la politique urbaine.
Je m’intéresse en particulier à Lagos et Mexico, en m’interrogeant sur les modalités de leur relative autonomisation politique depuis la fin des années 1990, et aux processus de formation de gouvernements urbains dans ces deux mégalopoles depuis lors. Depuis une quarantaine d’années, Lagos et Mexico ont été transformées par des recompositions économiques, politiques et sociales importantes qui les ont partiellement disjointes des leurs sociétés nationales, et ont ouvert de nouveaux espaces d’autonomie et d’institutionnalisation politique à l’échelle urbaine.
Je montre en particulier que les classes populaires de ces deux villes jouent un rôle central dans l’évolution politique de ces mégalopoles, par le développement d’espaces et de réseaux de politique populaire qui contraignent leur développement, régulent les conflits au sein des économies informelles et entre les groupes sociaux, et sont à la base du développement des institutions urbaines. Pour mieux saisir les recompositions sociopolitiques de Lagos et Mexico, je retourne à un idéal-type Wébérien quelque peu oublié : celui de la ville plébéienne.

Je travaille par l’ethnographie, que j’ai menée dans deux quartiers populaires de Lagos et Mexico.
Je me suis intéressé en particulier aux travailleurs des économies du chiffonnage (« economies of urban mining »), qui travaillent les déchets et matières premières secondaires. Ces économies, principalement informelles, ont une valeur heuristique forte pour comprendre les transformations économiques et politiques de Lagos et Mexico depuis quarante ans, dans la mesure où elles ont été, pour les classes populaires, au croisement de diverses stratégies de gestion de la paupérisation advenue à partir des grandes crises économiques des années 1980. Les déchets sont pour moi une méthode qui me permet de saisir les modes d’auto-régulation populaire, leur intégration politique (notamment par la politique partisane et le clientélisme), et leur rôle dans la formation d’institutions urbaines. J’ai travaillé avec une grande diversité d’acteurs allant d’un gang impliqué dans la gestion des déchets à Lagos au syndicat des éboueurs à Mexico, en passant par des hommes et femmes politiques de quartiers et les travailleurs eux-mêmes (éboueurs, balayeurs, ferrailleurs).

Quelles principales questions traitez-vous actuellement ?

Je travaille actuellement à la publication de ma thèse.

Par ailleurs, je poursuis un projet de recherche entamé dans le cadre de mon postdoc au Centre d’Études Européennes et de Politique Comparée, portant sur les conflits autour de la construction de logements dans le Grand Paris. Avec ma collègue Julie Pollard, de l’Université de Lausanne, nous étudions les acteurs, la structuration et les modalités de ces conflits, en tâchant de saisir les dynamiques à l’œuvre dans leur mise en réseau et la constitution ou non de coalitions anti-croissance urbaine à l’échelle métropolitaine.

D’où vient cet intérêt pour vos recherches ?

Au-delà de mon intérêt d’ethnographe pour mes terrains au Mexique et au Nigéria, envers lesquels j’ai développé un attachement fort, les recherches que je mène à Lagos et Mexico me passionnent car il me semble que les dynamiques de recomposition sociopolitique à l’œuvre dans ces deux villes, dont la connaissance demeure parcellaire et peu consolidée, posent des questions fondamentales de sociologie politique.
Par exemple, leurs transformations invitent à reconsidérer l’articulation des processus de différenciation socioéconomique, d’autonomisation et d’institutionnalisation en questionnant certains fondamentaux de la sociologie de l’État. Les modes d’action collective qu’on y rencontre poussent les analyses classiques du clientélisme à leurs limites, en même temps qu’ils questionnent les modèles occidentaux d’analyse des ordres de régulation intermédiaires.

Du point de vue de la sociologie historique du politique, l’analyse des relations villes-États sur le temps long (en remontant par exemple au « city-empire » aztèque, aux États-cités de Lagos ou Haoussas), peu consolidée en ce qui concerne l’Afrique de l’Ouest et l’Amérique Latine, offre de nouvelles clés de compréhension des configurations politiques contemporaines.

Enfin, l’étude des institutions urbaines qui y émergent ouvre de nouvelles pistes en théorie politique, en même temps qu’elle invite à la redécouverte de traditions théoriques quelque peu oubliées, y compris européennes, telles que celle incarnée par le philosophe napolitain Giambattista Vico.

Quelles sont vos motivations pour choisir LAM ?

J’ai décidé de rejoindre Sciences Po Bordeaux en tant qu’ATER en grande partie du fait de LAM, certain d’y trouver une communauté de recherche de haut niveau tout en étant à taille humaine. Je me réjouis de la pluridisciplinarité du laboratoire, bien soulignée par les arrivées de Sara Panata et Quentin Chapus. Je suis certain de beaucoup apprendre au contact de mes nouveaux collègues.